samedi 18 octobre 2014

Module 2 : 17 Octobre au 24 Octobre



Consignes

Présentation 


La voix est le premier contact oral de la communication verbale. Après la mise en scène du corps, la voix entre en deuxième position dans le jeu de la relation éducative, elle marque ainsi le début du cours. La prise de parole est le témoin privilégié de l’état émotif de la personne qui est mise à nue sous le regard de l’assistance.

Elle nous renvoie dans l’instant à l’état psychologique de l’enseignant, elle est le reflet signifiant de son assurance ou de sa fébrilité. Dès que les mots viennent prendre le relais de la présence incarnée, on est renseigné sur la teneur du propos. Les premiers sons sortis de la bouche de l’orateur portent déjà en eux dans la seule musique des mots utilisés, une singularité qui est propre à chacun. 
Cette musique des mots se traduit par le timbre, la hauteur, le parcours intonatif, l’utilisation d’accentuations, une certaine vivacité ou monotonie qui assure une fluidité du discours. Autant de paramètres musicaux qui crée la suspension à l’écoute et même bien au delà qui témoignent du type de relation qui va s’engager avec l’auditoire.
Très vite en une vingtaine de secondes l’auditeur a suffisamment d’indices pour se faire une idée du profil de la personne qui se trouve en face de lui. Qu’il est important cet instant du premier contact oral ! Quelle intention véhicule le premier son sorti de la bouche de l’enseignant ? Un bonjour accompagné d’un geste et d’un regard rassembleur, encourage le groupe à suivre l’animateur, il est de fait gage d’une meilleure relation.
La voix devient un indicateur qui précise rapidement le type de relation que cherche à établir l’enseignant. Les paramètres musicaux de la voix nous montrent si la personne cherche à être à l’écoute de ses élèves ou étudiants, ou au contraire s’il cherche à mettre de la distance. Plus d’une fois, malheureusement, lors de nos observations, nous avons pu remarquer, que ce rituel de l’accueil n’était pas systématiquement pratiqué par le professeur.
Nous l’identifions comme un micro geste professionnel capital dans la communication, que nous nous trouvions en école primaire au collège ou à l’université, ce moment symbolique du premier contact est essentiel ; il constitue une sorte de sas d’entrée où chacun est invité à rentrer dans un autre état. Ce moment peut être considéré comme l’instant T qui marque le début de la séance montrant ainsi l’ouverture de la séance. 

Ce moment symbolique de l’accueil dépend donc étroitement des indices perçus en liens étroits avec les images reçues. Faut-il dès lors en déduire qu’il n’est pas possible de commencer autrement un cours ? Certes non, mais il ne faut pas en retour, attendre du public, un quelconque intérêt pour la personne qui va délivrer son propos, même si par ailleurs le contenu peut s’avérer être intéressant.

Durée

17 Octobre au 24 Octobre Attention on prend un rythme de croisière avec une séance par semaine !

Objectifs


Repérer puis maîtriser les paramètres de la voix que sont :

  • Son parcours intonatif, « la musique des mot »

  • Son timbre, sa tessiture ou registre…

  • Ses lieux de résonance…

  • Son intensité…

  • Son débit…

  • Sa portée…

  • Son articulation…

  • Ses particularités, accents,  autres singularités…


 « Maîtriser des gestes de techniques vocale »

Repérer puis maîtriser la construction dynamique d’un discours.

 Construction en tension détente du discours.

  • Le parcours intonatif.
    • modulation de la voix…

  • Les césures.
    • Suspensives ou conclusives…

  • Les accentuations en fonction du découpage sémantique d’une phrase.
    • suspension à l’écoute, l’attention…

  • Les nuances…

Activités



Module 2: Micro geste de la voix

Avec deux jours de retard voici enfin le
module 2  (environ 1h20 d'activité)



Pour compléter la partie physiologique voici la partie qui interroge
le mirco-geste professionnel de la voix dans la construction dynamique du discours


 Suite à ce visionnage, vous retrouverez dans ce  Tableau récapitulatif du Micro-geste: Voix  (déjà vu à la séance1 )
l’incidence que peuvent avoir les différents marqueurs du micro-geste de la voix

samedi 4 octobre 2014

Tableau Micro-geste5 usage du mot

Micro- geste de l’usage du mot : Voici récapitulé dans deux tableaux le micro-geste de l’usage du mot et les marqueurs techniques qui influent et interagissent sur le micro-geste de l’usage du mot dans les trois registres : registre de l’instruction, de la régulation et de la discipline.

L’usage du mot
Icône
Aspects kinesthésiques (auditifs)
Indice
Indice d’une relation d’une action
Symbole
Intention relationnelle didactique et/ou émotionnelle
Registre de l’instruction
Adressage
+ ou - approprié
(S’) Exprimer
La langue
Registre de la régulation
Régulation
+ ou – audible
réguler
L’apaisement
Registre de la discipline
Autorité
+ ou – forte
contrôler
L’injonction

Tableau: Micro-geste de l’usage du mot.

Marqueurs
Icone
Indice
Symbole
Qualifié
Choix + ou - pertinent
(S’) Exprimer
Langage de l’expert
Non qualifié
Choix non pertinent
Langage familier
Médiation
Présence plus ou moins effective du mot
Dédramatiser
Temporisation
Identification
Adressage ciblé
Etablir un contact
Reconnaissance
Reformulation
Répétition (nombre de fois et/ou qualité)
Clarifier et stabiliser
Démonstration
Stimulation
Activité + ou - intense
Encourager
Participation
Séduction
Attention + ou - captée
Captiver
Séduction
Autorité
Pouvoir + ou - respectée
Signifier
La loi
Sanction
Réponse + ou - adaptée
Soumettre
Le règlement
Répressif Dénégation
Attitude + ou - adaptée
Réagir
Répression, dénigrement

Tableau : Les marqueurs techniques : influent et interagissent sur le micro-geste de l’usage du mot dans les trois registres cités.

vendredi 3 octobre 2014

Le micro-geste de la voix

Une fois l’entrée en scène assumée dans la posture gestuée, la voix prend rapidement le relais, elle est le premier contact oral de la communication verbale. Après la mise en scène du corps, la voix entre en deuxième position dans le jeu de la relation éducative, elle marque ainsi le début du cours. La prise de parole est le témoin privilégié de l’état émotif de la personne qui est mise à nue sous le regard de l’assistance.
Elle nous renvoie dans l’instant à l’état psychologique de l’enseignant, elle est le reflet signifiant de son assurance ou de sa fébrilité. Dès que les mots viennent prendre le relais de la présence incarnée, on est renseigné sur la teneur du propos. Les premiers sons sortis de la bouche de l’orateur portent déjà en eux dans la seule musique des mots utilisés, une singularité qui est propre à chacun. 

Cette musique des mots se traduit par le timbre, la hauteur, le parcours intonatif, l’utilisation d’accentuations, une certaine vivacité ou monotonie qui assure une fluidité du discours. Autant de paramètres musicaux qui crée la suspension à l’écoute et même bien au delà qui témoignent du type de relation qui va s’engager avec l’auditoire.

Très vite en une vingtaine de secondes l’auditeur a suffisamment d’indices pour se faire une idée du profil de la personne qui se trouve en face de lui. Qu’il est important cet instant du premier contact oral ! Quelle intention véhicule le premier son sorti de la bouche de l’enseignant ? Un bonjour accompagné d’un geste et d’un regard rassembleur, encourage le groupe à suivre l’animateur, il est de fait gage d’une meilleure relation. La voix devient un indicateur qui précise rapidement le type de relation que cherche à établir l’enseignant.

Les paramètres musicaux de la voix nous montrent si la personne cherche à être à l’écoute de ses élèves ou étudiants, ou au contraire s’il cherche à mettre de la distance. Plus d’une fois, malheureusement, lors de nos observations, nous avons pu remarquer, que ce rituel de l’accueil n’était pas systématiquement pratiqué par le professeur.

Nous l’identifions comme un micro geste professionnel capital dans la communication, que nous nous trouvions en école primaire au collège ou à l’université, ce moment symbolique du premier contact est essentiel ; il constitue une sorte de sas d’entrée où chacun est invité à rentrer dans un autre état. Ce moment peut être considéré comme l’instant T qui marque le début de la séance montrant ainsi l’ouverture de la séance. Ce moment symbolique de l’accueil dépend donc étroitement des indices perçus en liens étroits avec les images reçues. 

Faut-il dès lors en déduire qu’il n’est pas possible de commencer autrement un cours ? Certes non, mais il ne faut pas en retour, attendre du public, un quelconque intérêt pour la personne qui va délivrer son propos, même si par ailleurs le contenu peut s’avérer être intéressant.

Le micro-geste de la voix

Image : « Les aspects kinesthésiques et/ou organologique» 

Indice : « d’accompagnement et/ou renforcement  d’un dire »

Symbole : d’une intention relationnelle (technique, didactique, médiatrice) et/ou d’un état émotionnel (conscient ou inconscient)

            Lorsque l’on observe un enseignant en situation d’exercice professionnel dans son entrée en scène, si sa présence corporelle dans tous ces aspects de la communication non verbale nous « saute aux yeux », nos pouvons dire que la voix elle, nous « saute aux oreilles ». Bien qu’immatérielle et non visible, elle vient « d'un bond », s’imprimer au plus profond de notre système de perception.

Avant qu’on ait eu le temps d’en analyser les causes, l’effet acoustique a été perçu, il est là bien présent au centre de la scène. Toutes ces caractéristiques vont être plus ou moins consciemment analysées et catégorisées par le récepteur. Cette empreinte acoustique n’est pas neutre, elle est intimement liée à la personnalité du locuteur, elle se caractérise par de nombreux paramètres tels que la hauteur, le débit, l’intensité, l’articulation… Autant de paramètres acoustiques passés au filtre de l’oreille du musicien que nous allons analyser et qui ont des répercussions sur la communication verbale en cours.


  •        Nous avons repéré plusieurs paramètres qui tous rentrent en jeu comme marqueurs  dans la maitrise de l’instrument ; ce peut être :
    -        Le timbre, sa tessiture ou registre…
    -        Le parcours intonatif,  ou « la musique des mots »,
    -        Le lieu de résonance…
    -        L’intensité…
    -        La respiration
    -        Les césures suspensives o conclusives…
    -        Le débit…
    -        L’accentuation…
    -        L’intensité…
    -        Sa portée…
    -        L’articulation…
    -        Les particularités, accents, autres singularités
  • Dans l’ensemble de nos observations, nous avons pu relever plusieurs indicateurs importants. Je parle ici d’observations fines, car elles font appel à un autre sens que celui  plus habituellement usité qu’est la vue, je veux parler ici de l’ouïe. En effet, on ne peut s’intéresser à la voix sans parler un instant de l’audition, et des conduites de perception qui ont pour mission de récupérer, capturer l’information pour en faire une trace en mémoire. 

    Robert Francès dans son ouvrage de 1984 sur La perception de la musique  parle de la fonctionnalité de  « Ces étapes successives du fonctionnement des conduites de la réception sensorielle qui vont jusqu’à la réponse comportementale ».[2] Elles vont de la première vibration aérienne jusqu’à l’impulsion électrique qui marque notre mémoire grâce à l’entremise des cellules ciliées qui elles impriment leur empreinte dans les synapses, tout un cheminement dans l’infime. Cela a pour conséquence directe de ne pas mettre l’objet acoustique, directement à disposition du sujet.  

    Contrairement à la vue, qui nous permet dans l’instant de revenir sur la chose examiné, en travaillant sur le « média » l’oreille est plus subtile, elle nous permet d’établir le contact avec l’objet, qu’une fois passé au filtre d’une conduite de perception sinueuse qui dans le meilleur des cas va aboutir à une représentation mentale dans « l’immédiat ».

    Dans le cas contraire, pour certains d’entre nous, l’objet n’existe même pas, le schème mental qui aurait du faire trace, n’a pas laissé d’empreinte suffisante au niveau des structures mentale que nous allons chercher à interpeller, elle est souvent si infime, que le sujet ne peut pas la reformuler et tirer à son égard une quelconque observation. C’est pour cela, qu’il est ici, capital pour nous, de préciser dans cette étape de notre recherche, l’importance que nous avons eu à nous servir d’un outil adéquate quant à la qualité de restitution de la prise de son, et ceci a été pour nous plus d’une fois un problème à surmonter, la source sonore ne devant pas se trouver masquée par trop de sons parasites. 

    Comme nous venons de le préciser, seule la trace de ce que nous avons perçu dans l’instant de cette musique du mot, a pu laisser dans notre mémoire, va nous permettre ou non d’en analyser certains éléments du langage. Mais cette conduite dans le mécanisme de la perception, n’est pas toujours perceptible par tous les étudiants ou professeurs en stage, et plus d’une fois, nous avons été étonnés, en tant que musicien, de l’extrême difficulté de nos étudiants à pouvoir percevoir ce que nous aurions souhaité qu’ils perçoivent. 

    Notamment ce que nous nommerons la maîtrise de la construction dynamique du discours, ce que nous pourrions convenir d’appeler d’une manière plus commode, « La musique du mot ». Il est remarquable de constater la parenté que nous avons été amenés à faire, entre le langage musical dans sa construction structurelle et temporelle des différents paramètres du langage qui le constitue et la musique des mots que nous utilisons dans le langage parlé. 

    En effet, nombreuses peuvent être les similitudes. Si l’on prend par exemple l’usage de la mélodie, c'est-à-dire le rapport de hauteur des sons entre eux, de même qu’une mélodie ne peut être construit sur une seule note, de même, le parcours intonatif de la voix ne peut tout autant se réduire en une seule fréquence. 

    Plus d’une fois en effet, nous avons rencontré cet obstacle lors de nos observations, chez les enseignants ou étudiants, et constater combien cet élément du langage pouvait être un frein dans la communication, leur auditoire décrochant, confronté à la lassitude d’un discours déclamé sur une seul note, l’attention retombe rapidement. Qui d’entre nous n’a pas en mémoire cette conférence bien ennuyeuse de tel ou tel professeur, exposée sur un seul ton, un parcours intonatif « mono tono ».
    • Nous avons pu constater que le timbre pouvait être considéré comme étant en quelque sorte la carte de visite acoustique de l’orateur. A tel point qu’une particularité vocale, un  accent ou un timbre trop marqué, va rapidement retenir toute l’attention des élèves, suivant qu’il est placé dans le nez la gorge ou la tête, les résonateurs sollicités, vont profondément  modifier et affecter la qualité du timbre. 

      La conséquence directe est que ce dernier soit plus ou moins agréable à entendre ; cela va jusqu’à gêner, voire agacer les élèves. Thierry parle avec une voix placée dans le masque avec quelques résonances situées légèrement dans le nez, cela lui donne un timbre quelque que peu nasillard par moment. Les élèves par définition sont à l’affût de tout, immanquablement, un élève l’interpelle sur cet aspect de sa voix, il répond très promptement : (EV/T à 16’48’’) « Je n’y peux rien, j’ai expliqué c’est mon accent, on ne peut rien y faire ». La remarque s’arrête heureusement là. Cet incident nous amène à nous interroger sur cette particularité de la voix dans son aspect très intime de la personne.

      Nous sommes ici en présence d’un micro-geste de la voix, « dans ses aspects  organologiques » dans une fonction dynamique plus ou moins séduisante. Indice/   « une intension, de captation de l’auditoire ». Dans un symbole qui est « l’expression d’un dire qui cherche à séduire l’auditoire ».

      Remettre en cause la voix d’une personne s’est s’attaquer à la personnalité même de l’orateur. C’est pour cela, que dans les toutes premières minutes des entretiens, cette question d’aimer ou non sa voix quand on l’entend, a été posée plus d’une fois. 

      Béatrice elle, est très préoccupée par la hauteur de sa voix ; elle a un timbre particulier, situé dans les aigus, avec une élocution très rapide, lors de l’entretien elle fait cette remarque qui montre sa préoccupation : (EAC/B 1’59’’) « Je pensais que ma voix aurait été beaucoup plus aigue que cela… ce n’est pas si aigu que cela… mais bon, il y a des hésitations …c’est normal je ne pense pas que cela gêne beaucoup ».

      Sachant qu’elle parle dans un registre élevé, elle redoutait ce moment où elle devrait s’y confronter, elle se rassure en voyant que somme toute cela ne nuisait pas à sa séance. Ce qui est remarquable ici, c’est qu’elle tient ce propos après seulement deux minutes d’entretien, cela nous montre à quel point écouter sa voix est un exercice redoutable.

      Rencontrer sa voix c’est comme rencontrer un intrus. La raison en est simple, nous ne percevons pas notre voix de la même manière si nous l’écoutons enregistrée.  La situation de l’oreille interne, collée dans la boite crânienne vient modifier la perception de notre voix
    • Le marqueur du parcours intonatif : « de la tension détente à l’attention » [ Ajouter une section ici | Modifier | Historique ]

      « Ah maîtresse, quand tu parles, tu chantes ! » Cette remarque faite par une élève il y a quelques années lors d’une visite est fort judicieuse. Un élève aurait pu faire la même réflexion dans la clase de Patrice, en fait, il donne réellement l’impression de chanter. Cela tient à son parcours intonatif qui est construit en tension détente, comme le serait une phrase musicale. 

      En analysant plus finement une des phrases qu’il utilise lors d’une mise en activité, on s’aperçoit très vite que toutes les fins de ses phrases se terminent la plupart du temps sur une note haute, interrogative, comme pour laisser en suspension et maintenir l’attention des élèves. Les musiciens diraient sur une dominante, en suspension. 

      Jusqu’au moment où il conclu et fait retomber l’attention en baissant la voix : (EV/P à 5’’ cassette N°2) « Camilla tu en mettrais combien de carrés verts dans le grand rectangle ? » Toute la phrase est donnée sur une note plutôt haute, dans un seul rythme régulier, sans respiration, jusqu’à la dernière syllabe qui elle chute d’environ d’une tierce (intervalle de deux tons). Sur tout le parcours intonatif, nous avons eu deux accents un au début un à la fin.

      Dans un deuxième temps l’enseignant reprend les propositions des élèves en les reformulant comme pour maintenir le groupe en halène, par trois fois : (EV/P à 10’’ cassette N°2) « Quin--ze, vin--gt, dou--ze, », chaque nombre proposé par un élève est repris, mais avec une intonation qui monte à chaque fois d’environ d’un ton.

      Cela a pour conséquence de tendre la participation des élèves qui lèvent la main et de stimuler les propositions, pourtant très vite une fois l’attention de tous conquise, l’enseignant conclut ce moment d’animation dans la situation d’exploration par cette phrase : (EV/P Doc. N°2 à 15’’) « Eh bien on va envoyer quelqu’un au tableau pour justement le savoir. » comme pour détendre la concentration et relâcher l’attention des élèves, la voix retombe dans le grave sur la dernière syllabe sur le verbe faire, tout comme le musicien lui dans la phrase musicale, retourne à la tonique. 

      Nous sommes là dans un temps de mise en scène remarquable, où l’enseignant se sert de cet outil pour stimuler la participation de sa classe. Voilà la remarque de Patrice lors de l’entretien : (EAC/P 16’20’’) « Mon timbre de voix est vraiment lié à l’argumentation. Stop ma voix descend, c’est assez flagrant (frappant ?) cadence finale, fin du discours symbolique ce n’est pas négociable. » Ici c’est bien Patrice qui fait l’analyse même si nous ne verrons pas la suite, il n’en avait pas conscience dans l’instant.
      -Nous avons là un micro-geste de la voix, « Dans ses aspects organologiques » dans une fonction dynamique plus ou moins captivante. Indice/ « Une intension, de stimulation du groupe ». Dans un symbole qui est « l’expression d’un dire dans une interaction collective ».

      Ce pattern de temps, peut se représenter comme un grand DELTA qui symbolise la construction en tension détente du discours. La progression de la tension étant représentée par trois paliers successifs ; trois temps où l’enseignant va reformuler les propositions en montant à chaque fois d’un ton dans le parcours intonatif ainsi qu’en intensité, il parle de plus en plus fort.

      Nous pouvons rapprocher ce phénomène de ce que les musiciens appellent le resserrement agogique (la musique tend vers le haut, de plus en plus forte, et de plus en plus vite), pour atteindre le sommet à « douze » avant de retomber à la fin de la dernière phrase, « on va demander à quelqu’un de le « Faire » »

      Ce mécanisme du parcours intonatif dans la musique des mots, de par la « tension » du discours, crée « l’attention » avec deux « t » de l’auditoire. Ce dispositif n’a été que faiblement, voire très partiellement utilisé par les enseignants observés. Pourtant ce micro-geste de la voix dans son cheminement intonatif est fort utile pour maintenir l’attention d’une classe. Sur les huit novices ? Tous ne s’en servent pas avec la même pertinence.

      En physique notamment le temps des consignes est un moment capital, mais très long il faudra plus de sept minutes à Béatrice pour donner les différentes consignes et recommandations. La conséquence directe est qu’il devient très délicat de maintenir l’attention des élèves, sachant que le déroulement se fait par étapes, qui sont systématiquement ponctuées par un connecteur de classification, ici, le mot ‘ensuite’ revient 11 fois sur les 7 minutes du temps des consignes. 

      Comment rendre la lecture de toutes ces étapes plus attractive, en jouant davantage avec ce micro-geste du parcours intonatif ? Nous avons là un véritable enjeu pour cette discipline.


      Il en va de même lorsque Martine en classe de CP essaie de jouer avec sa voix, dans la lecture des poésies (EV/M de 1’’ à 2’27’’). Nous sommes très loin de toutes les possibilités que ce travail de mise en bouche du texte permettrait. 

      Dans un parcours musical, non seulement l’intonation va rentrer en jeu, mais aussi les variations de débit, d’accentuation, de nuances, des différentes césures… Qu’elles soient suspensives ou conclusives, toutes ces césures sont autant d’effets qui doivent venir captiver l’émotion, suggérée par l’interprétation du texte. Martine reste dans une lecture offerte, très superficielle.
    • La source du média, ici la voix qui est chargée de transmettre les langages les plus singuliers reste toujours une onde hertzienne. La voix, parlée ou sifflée, comme certains peuples sont encore capable de le produire aujourd’hui ne peut se détacher d’un lieu donné. Elle doit se faire à partir d’une source identifiée, située consciemment pour être suffisamment audible de tous. Dans nos observations, cette qualité acoustique n’a pas été toujours à la hauteur de ce qu’elle aurait du être, venant ainsi perturber le bon déroulement de la séance.

      Le canal qui véhicule le message sera-t-il efficace, suffisamment fort en intensité, percutant pour projeter la voix dans une direction avec une intention et une certaine conviction pour permettre une bonne circulation de l’onde sonore jusqu’à sa cible. L’œil cet autofocus de l’oreille, va prendre la mesure de la distance à couvrir, la posture lui donne le point d’encrage indispensable à l’énergie diffusable, la colonne d’air le point d’appui pour projeter la production vocale sur l’avant de la personne et ainsi donner à entendre et circuler l’information dans une direction, pour faciliter une bonne captation des informations diffusées oralement.

      Mais bien d’autres paramètres se sont présentés aux détours de nos observations ; nous voyons que tous ces paramètres sont comme indissociables les uns-des autres. Tous ces micro-gestes inhérents à la voix participent concomitamment à la bonne diffusion du message oral. La portée ne peut se faire sans une bonne assise vocal, si la posture n’est pas stable le point d’appui ne sera pas là la portée non plus. 

      Il en va de même pour bon nombre d’autres paramètres, ce peut être le débit, l’articulation… Ils sont certainement plus faciles à mettre en évidence lors de la relecture des enregistrements, mais pourtant bien handicapant lorsqu’ils ne sont pas intégrés.
    •    Si l’on prend le débit, nous avons pu constater, qu’en dépit des évidences qui font qu’un débit trop rapide peut être fatiguant et qu’un débit trop lent peut vite devenir ennuyeux, nous avons fini par remarquer un fait : le débit choisi joue un rôle important dans la conduite de cette dernière.

      En effet, lorsqu’un groupe est très dissipé, nous avons pu constater qu’un propos trop lent n’arrivait jamais à prendre le dessus. Bien que plus d’une fois un conseiller pédagogique ait demandé à un étudiant de faire le silence et d’attendre, cette solution s’est manifestement très rapidement avérée inefficace, il en va de même de l’idée de baisser le volume de la voix ; même si l’indice perçu va être une alerte sur l’intention du locuteur et peut être sur le moment, calmer quelque peu les énergies.

      L’effet, si tant est qu’il puisse fonctionner un court instant, n’en est malheureusement que très éphémère. Seule une présence très prégnante du maître va pouvoir reprendre en main une telle situation ; et dans ce cas, plus d’une fois, nous avons pu constater qu’il était important d’être capable de prendre les sujets perturbateurs de vitesse, comme si la voix venait concentrer les élèves dans des consignes qui peu à peu allaient les canaliser dans une activité où leurs corps seraient neutralisés dans une tâche bien précise.

      Nous avons fait un tableau récapitulatif des différents tempi utilisés par nos protagonistes. Comme nous l’avions fait pour les déplacements nous avons vu une grande variabilité dans les tempi. Par exemple, entre Martine et Patrice, la variation est très importante. Est-ce à dire que tous les enseignants qui on un tempo un peu plus rapide réussissent mieux ? 

      Dans le cadre de l’école primaire et secondaire en tout cas, prendre le groupe de vitesse semble être un paramètre important, notamment dans les classes particulièrement difficiles à gérer. Le tempo soutenu maintien un état de centration des élèves sur l’activité, comme les enfermant dans une dynamique de jeu collectif. 

      Dans l’image que la portée de la voix véhicule, l’enseignant doit prendre la mesure des espaces qu’il va créer. Par le simple usage de ce micro-geste particulier, chacun sera à même de comprendre l’espace symbolique représenté. De par l’aura ainsi dessiné, chacun sera en mesure de comprendre où il doit se situer. Soit l’espace est global partagé par tous, soit il devient plus intime ; dans ce cas, c’est le temps de la relation privilégiée entre l’enseignant et l’élève.

      Le temps de l’individualité. D’autres micro-gestes professionnels viennent alors en renfort, ils ont une importance tout aussi primordiale, que ce soit les déplacements la proxémie… Encore une fois nous voyons que tous ces micro-gestes professionnels sont comme interdépendants les uns des autres.

      Nous avons là un micro-geste de la voix  et dont nous rappelons les aspects génériques
      Image : « Les aspects kinesthésiques et/ou organologique» 

      Indice : « d’accompagnement et/ou renforcement  d’un dire »

      Symbole : d’une intention relationnelle (technique, didactique, médiatrice) et/ou d’un état émotionnel (conscient ou inconscient
    •             Nous voudrions maintenant regarder l’accentuation, qui est aussi un marqueur très caractéristique du micro-geste de la voix. Pour beaucoup de sujet observés, l’accentuation est un moyen d’affirmer une idée, soit de se remettre en scène. L’accentuation vient comme témoin et catalyseur de l’énergie, redonner de l’élan à un propos. 

      De plus il a une deuxième fonction, c’est de mettre en valeur certain mots qui font sens et doivent retenir toute l’attention des élèves. Certaines fois ces mots sont accentués syllabiquement pour bien les identifier. Est-ce un moyen mnémotechnique pour en faire trace en mémoire ? Toujours est-il que nous avons observé plusieurs fois cet usage. 

      Patrice nous montre un usage de l’accentuation accompagné d’un geste très explicite ; les  élèves reprennent : « Dé ci mètre Dé ca mère, He cto mètre, Ki lo mètre… » (EV/P Doc. N° 2 à 27’26’’).

      Comme pour la musique, l’accentuation a un rôle tout aussi fondamental dans la mise en valeur d’une idée dans la musicalité du langage parlé. Plus d’une fois, lors de nos séances d’enregistrement, nous avons pu constater que pour beaucoup d’orateurs, tous les mots étaient présentés avec la même dynamique.

      Pourtant, la mise en valeur de certains mots par l’accentuation est un élément essentiel de la compréhension d’un texte. L’accent vient insister sur un mot clé, en cela il attire l’attention des élèves sur le sens que l’on cherche à développer dans l’énoncé de la phrase. 

      Le plus intéressant dans nos observations, est le fait que l’accent n’est jamais seul dans la mise en scène du discours, il est en général accompagné par un geste qui vient souligner le propos, comme le fait systématiquement Patrice dans l’exemple cité ci-dessus.

      Un détail supplémentaire nous est apparu lors de ces observations. Le détail est petit, mais oh combien important ; avant l’accentuation, il y a comme une petite suspension, un petit silence, très court, mais très significatif, il vient interpeller le public, comme pour attirer son attention le mettre en tension. Cette rupture du conduit mélodico rythmique, semble être posée là, comme pour engendrer du contraste, ainsi, il crée comme une sorte de surprise ou suspension à l’écoute ; il met du relief dans le déroulement de la fluidité de l’oral.
    • Il nous reste à parler de l’articulation, qui est peut-être l’indicateur le plus facilement perceptible pour la personne non habitué à faire fonctionner son oreille, pour la simple raison qu’un mot mal articulé ne peut être en fait compris et que visuellement certains indices sont manifestement tangibles. 

      Il va donc de soi qu’un discours doit être à minima correctement articuler par son orateur, mais la source de l’articulation si l’on observe de prêt son mécanisme est lui aussi plus délicat qu’il n’y parait. En effet, bien que l’on ait conscience que les zygomatiques muscles qui créent le mouvement d’ouverture et de fermeture de la mâchoire jouent un rôle important dans l’articulation, ils ne sont pourtant pas les seuls à intervenir dans la phonation, les différentes zones qui interfèrent sont nombreuses tout au long du parcours de l’air, comme nous avons pu le réaliser avec la réalisation de l’animation 3D que nous avons conçu avec le service ICAP de l’université Lyon1.

      Quelle soit gutturale, labiale ou linguale, l’articulation va être plus ou moins efficace en fonction des nombreux facteurs qui vont venir la transformer. Il y a notamment les lèvres, qui comme nous avons pu le constater lors des productions filmés jouent un rôle important et visible ; de plus elles deviennent souvent un véritable soutien à la compréhension, l’exemple le plus frappant et cette trop fameuse lecture de dictée, fractionnant syllabiquement les mots afin d’en faciliter écriture.

      Pourtant, nombreux sont les étudiants qui ne savent pas s’en servir. 

      L’articulation est un peu comme le travail de l’ébéniste qui vient ciseler la voix dans le découpage syllabique d’un mot. L’enseignant doit fait marcher ses zygomatiques, ces muscles accrochés à la mâchoire qui servent à modifier les phones et allophones qui constituent  les réalisations sonores des phonèmes propres à une langue. La dextérité du musicien dépend de la virtuosité de son toucher, de la manière dont il va rentrer en contact avec la corde du violon ou la touche du piano.

      La dextérité de l’enseignant dépend elle aussi de la manière où ce dernier va rentrer en contact avec sa maîtrise musculaire à produire des phonèmes qui constituent les briques élémentaires de la chaîne de la production de la voix parlée. 

      Responsable pendant dix années de suite d’une UFP (Unité de formation professionnelle) à l’IUFM de Lyon, nous avions en charge les professeurs de langue ; une des difficultés qu’ils rencontrent c’est d’être capable d’ajuster son articulation à la capacité des élèves à repérer globalement des sonorités, mais aussi ces plus petites entités phonologiques qui constituent les mots utilisés d’une langue. 

      Derrière la perception globale, l’élève va chercher dans une perception plus fine à repérer le découpage syllabique des mots entendus. Il va même chercher à reconstruire visuellement mentalement jusqu’aux lettre qu’il sera capable d’identifier qui composent le dit mot afin de mieux le retenir et de pouvoir l’écrire. Une anecdote retient notre attention qui peut venir illustrer ce propos. Nous avions en formation dernièrement un professeur d’université d’origine étrangère qui devait faire un cours en biologie moléculaire. 

      Dans le déroulement de ses conférences, ses séances de TD, ou TP, elle nous dit avoir des difficultés avec ses étudiants à cause de cette barrière de la langue. En situation avec ses collègues, nous avons été obligés de lui demander de reprendre plusieurs fois certains mots très complexes qu’elle utilisait, pour que nous soyons en mesure de les décrypter, d’être simplement capable les répéter sans forcément en comprendre le sens, qui lui était trop technique. 

      Dans les cas observés, nous avons pu constater que très souvent si le début de la phrase parlée est bien articulée, plus on s’approche de la fin de phrase plus la propension à diminuer l’articulation se fait sentir, jusqu’à certaine fois ne pas tout comprendre de lorsque l’on se trouve au fond de la classe derrière la caméra. 


      Nous constatons que nombreux sont les paramètres musicaux qui sont en jeu, tels que l’usage de la structure rythmique du temps développé lors d’un discours. En observant nos enregistrements, nous avons pu constater, que tous les orateurs n’ont pas la même conception du temps ; entre celui qui va faire de longues phrases, et va de développement en développement essayer de démontrer tel idée, ou tel concept, et celui qui va plus synthétiquement présenter plus lapidairement les faits, pour expliquer une démarche ou un problème, les conceptions du temps déroulé en représentation, sont donc très variables suivant les personnalités, mais aussi comme nous avons pu le remarquer, suivant que l’on vienne de domaines et de champs disciplinaires très  différents.

      En effet, lorsque l’on travaille avec des enseignants ou des étudiants qui appartiennent à une université dite des sciences humaines, nous avons pu observer, que le discours et souvent beaucoup plus sinueux, voire mélismatique pour en venir au fait. 

      Par contre, lorsque l’on travaille avec des enseignants qui sont issue d’une université dite scientifique comme Tiffany, Béatrice, Thierry et Olivier les enseignants sont plus direct, vont « droit au but ». Les phrases sont plus courtes, très lapidaires, elles disent l’essentiel en un minimum de mots. Ce phénomène nous étonne toujours lorsque nous travaillons avec les trois universités Lyon 1, Lyon 2 ou Lyon 3 de voir à quel point les modes de fonctionnement sont différents dans leur rapport au langage.

      Mais revenons à notre comparaison de la phrase parlée avec la construction dynamique d’une phrase musicale. Comme le musicien va mettre des accents et des césures dans la construction dynamique d’une phrase musicale, l’enseignant va lui aussi, avec des respirations et des petites ruptures, créer un véritable parcours musical du mot. En essayant de se représenter mentalement cet état de fait, nous avons schématisé la construction dynamique du discours sous la forme d’un delta.

      Mise en forme du delta sur une phrase :
      Somment en tension du discours (Musique dominante)
      V                      I                                                                         I
      Point de départ tonique)                                                     

      Retour de la détente (tonique)

      Ce triangle symbolise la tension progressive du discours dans son déroulement dans le temps. Le sommet en est l’accent qui va être consciemment mis à un moment ou à un autre, mettant ainsi en valeur le ou les mots qui sont la clé, porteur du sens, la chute est elle représentée par le dernier côté du triangle, le temps du repos où l’on revient à son point de départ. Mais ce delta va s’inscrire dans une succession de patterns de temps construits eux-mêmes dans une progression en tension détente, sous la forme d’un delta plus ample qui va tous les englober. Mise en forme du delta dans un paragraphe : une première partie de phrase sur une intonation interrompue par une première virgule, reprenant sur une intonation un peu plus haute (voire un peu plus fort) interrompue une seconde fois par une petite césure ou respiration, qui aboutit à un sommet de la tension dans une intonation plus aigue, pour revenir en fin de phrase sur une tonique .

      Ainsi se construit le développement du discours dans sa structuration d’un temps dynamique donnant à un paragraphe toute sa portée communicationnelle. 
      Dans cette représentation schématisée d’un discours, nous retrouvons la même palette d’effets dont nous sommes susceptibles de faire usage en musique. Que ce soit les respirations avec les césures plus ou moins suspensives ou conclusives, l’apport de l’accentuation pour mettre en relief certains mots, le travail sur les nuances, créant cette suspension à l’écoute dans le crescendo tous ces ingrédients qui participent de musique des mots sont là pour maintenir l’attention de l’auditeur et mettre en valeur le propos de l’orateur. 

      Nous ne sommes pas si éloignés de la mise en forme des éléments du langage musical dans une improvisation, ou une composition musicale. Encore une fois, la comparaison avec la phrase musicale peut être faite ; il est surprenant de constater, que lorsque les effets sont maîtrisés, l’enseignant et le musicien possèdent là un merveilleux outil de la mise en scène de leur prestation vocale ou instrumentale. 

      La virgule, le point virgule, le point, pour conclure une phrase, la tonique, la sous dominante, la dominante monte progressivement suspendent l’attention, dans la construction dynamique du temps musical tout comme le parcours intonatif lui se tend pour revenir à la tonique l’auditeur retrouvant une stabilité, lui permettant de reprendre son souffle, de laisser s’insinuer en esprit une conduite de perception le message du propos engagé, comme pour maintenir l’auditeur dans un jeu de voilà bien

      Il nous faut ici nous arrêter un instant pour expliquer le phénomène. Dans la construction du discours musical, en musique, la progression harmonique d’une phrase va de la tonique à la dominante pour revenir à la tonique en fin de mouvement, en quelque sorte d’une position de stabilité pour créée une tension et revenir à cette position de stabilité, il en irait donc de même avec la construction de la phrase à l’oral, si l’on veut capter l’attention maximale de son auditoire ?

      Le plus étonnant, c’est que l’on retrouve cet effet de la construction dynamique d’un discours dans ce formidable outil de la mémoire collective de notre langue qu’est la comptine. Elle s’est peu à peu façonnée, depuis des temps immémoriaux pour ne transmettre de génération en génération que les bons outils de l’oralité ? N’a été gardé que le nécessaire et suffisant à l’apprentissage des fondamentaux d’une langue. Cela n’est pas un hasard, si ces éléments du langage qui ont résisté à l’épreuve du temps s’inscrivent justement dans une construction dynamique en tension détente. 

      Cet exemple nous montre toute l’importance de la dimension psychologique qui sous tend un discours. L’attention est liée à la capacité d’absorbation des unités de sens mis en perspective dans la linéarité du discours. L’enfant ne pouvant maintenir et concentrer son attention que sur une durée limité, la musique du mot, sur ce modèle va structurer le sens dans un parcours intonatif précis. Partant de la tonique, que l’on peut considérer comme la fréquence de base, la hauteur autour de laquelle l’orateur parle le plus aisément, la comptine progresse dans un cheminement intonatif qui se tend monte progressivement à la rencontre de la dominante. 

      Ce parcours musical autour de quelque notes seulement, créer une tension mélodico rythmique, qui par étapes successives, doit aboutir à un sommet agogique. Ce moment particulièrement reconnaissable est crucial, il peut être anticipé dans le temps du souffle où l’on sent arriver l’accent qui vient mettre en lumière le mot ou l’idée que l’on ne doit pas manquer. La comptine sur ce modèle est bien faite, la chute est alors proche elle vient relâcher cette tension imprimée à l’écoute. 

      Les éléments dynamiques de la musique du mot trouvent leur aboutissement à l’effort fourni, sur le modèle du « Youpiii… » ou le « Tant piii… », si attendu par les enfants. En musique c’est le temps du retour à la tonique, le temps du relâchement de l’attention, un temps nécessaire, un passage obligé si l’on veut pouvoir poursuivre et maintenir un certain temps son attention en éveil.

      L’objectif de la comptine est de tenir en haleine l’enfant pendant une dizaine de secondes, cela lui apprend à maintenir son attention dans un temps donné, avant de relâcher sa concentration grâce à la formule ludique de fin, elle-même est en général accompagnée par le geste corporel collectif de s’accroupir. Ce moment si attendu de relâchement du discours joue sur le principe de la psycho acoustique, il est apprentissage d’un savoir différer le temps du plaisir partagé, savoir résister au vagabondage des sens en alerte, pour se plier à la tension musicale du discours, ainsi il va maintenir l’élève dans son statut d’auditeur attentif. 

      Cet élément du patrimoine commun, qu’est la comptine, est ‘étudiée pour’ ; non seulement elle participe à la mise en place de repères dans son allégorie historique, mais en plus, elle permet de comprendre les clés du principe de d’attention chez un auditeur. Cette construction ludique, psycho acoustique qui joue sur les mots, leur assonance et leur emploi, permet de mettre en scène le principe d’attention, un temps prévu ni trop long ni trop court. 

      Il participe de l’attention active, en venant en fin de comptine récompenser l’effort consenti par une petite formule  ‘magique’ : «Tant piii…», où tout le monde s’accroupi, éliminant ainsi, toute la tension nerveuse accumulée dans la phase de l’effort.

      Ne pourrait-on pas prendre ce mécanisme psycho fonctionnel, comme modèle pour le conduit discursif d’un propos pour créer une tension dynamique du discours, laissant à la fin de chaque moment important, un temps pour ingérer ce qui vient d’être dit ? La question serait de savoir, à quel moment ce principe doit-il être employé et quel serait le temps opportun qu’il conviendrait de prendre en compte, pour répondre aux contraintes de l’incidence de la psycho acoustique sur l’art de mettre en scène un exposé ? 

      N’est-ce pas dans ce temps d’un lucide repos, que l’élève saurait reconnaître la voie d’accès pour le stockage de l’information reçu, lui permettant ainsi de revenir sur ce qui vient d’être dit et le situant au regard de ce qu’il connaît déjà ? Ne serait-ce pas là, le temps de l’activité cérébrale, celle du passage au mental ?

      A ce propos, il nous revient en mémoire une séance, où un enseignant qui dans un parcours très mélismatique, essayait de transmettre à ses élèves un contenu, mais son propos très nébuleux, avait beaucoup de difficultés à capter l’attention de ces élèves et lors de l’entretien d’auto confrontation qui suivi, qu’elle n’a pas été sa déconvenue, lorsqu’il constatait qu’au bout de cinq minutes ses élèves décrochaient, lorsque nous avons visionné cet enregistrement nous n’avons pu que constater qu’aucun des micro-gestes reconnus comme opératifs n’était réellement mis en place, ni consciemment perçus.

      Points observés à développer

      - Maîtrise du parcours intonatif par rapport à un texte
      - Maîtrise des accentuations 
      - Maîtrise du débit
      - Maîtrise de la portée de la voix
      - Maîtrise de l’articulation
      - Maîtrise des césures et du découpage sémantique




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